32 ans, Céline Blandin, partenaire inattendue de l’industrie
Par Nadège HUBERT
Publié le 21 Mai 2023 à 20h36
Même si, en juillet 2022, elle a repris Elec’Trum à Levernois et désormais à Pommard, Céline Blandin ne se destinait pas à une carrière dans l’électricité industrielle. Epanouie dans sa vie professionnelle autant que dans sa vie personnelle, elle dépasse les clichés pour mener son activité avec dynamisme.
De grandes lunettes, une longue chevelure aux teintes rosées remontée en chignon, il ne faut pas se fier à la première impression en rencontrant Céline Blandin. Sous des apparences de jeune femme menue se cachent un dynamisme à toute épreuve. Dirigeante d’entreprise à 32 ans, elle a repris Elec’Trum en juillet 2022 même si son parcours, véritable fruit du hasard selon elle, ne l’y prédestinait pas. « Originaire de nulle part » comme elle le précise elle-même, Céline Blandin et sa famille ont suivi les mutations de son père militaire jusqu’à s’installer à Cluny en 2007. « Je voulais faire un bac L mais mes parents ne voulaient pas que j’aille en internat donc j’ai dû intégrer le lycée voisin où il n’y avait pas cette filière. » Sans appétence pour les mathématiques, elle choisit, par hasard, le cursus génie électrotechnique sans savoir où elle met les pieds. « J’ai compris en voyant le nombre de garçons dans la classe le jour de la rentrée et en lisant mécanique ou automatisme sur l’emploi du temps. » Son projet se résume alors à redoubler pour changer de voie mais très vite elle se ravise, s’imaginant bachelière pour rejoindre ensuite une carrière dans l’armée, elle qui se mettait déjà au service de la société en tant que pompier volontaire. Elève plutôt moyenne, elle échoue à obtenir le diplôme et redouble sa terminale. « Pendant l’année, j’ai rencontré un professeur qui aura un impact majeur sur ma vie. Il voit quelque chose en moi et m’encourage à intégrer son BTS après mon bac. J’y vois un plan B si j’échoue avec l’armée ! » Au test d’entrée, sa carrière militaire s’éloigne quand elle se blesse et ne finit pas les épreuves.
En route vers le BTS
Elle rejoint la filière de technico-commercial, une fois de plus sans savoir vers quoi elle se dirige. « Je retrouve ce professeur qui m’a fait évoluer et réussir jusqu’à devenir major de promotion. » En 2012, elle obtient son diplôme mais ses projets d’études se trouvent bouleversés par sa première maternité. Très vite, la jeune mère énergique ressent le besoin de retourner au travail. Elle sollicite Sonepar, entreprise où elle avait réalisé son stage pendant son BTS, alliant ses compétences acquises au lycée et ses fonctions commerciales. Parmi les postes disponibles, elle choisit celui de Beaune et déménage avec mari et enfant. De 2014 à 2017, la technico commerciale itinérante sillonne les routes jusqu’à sa seconde grossesse. « J’ai alors décidé de me poser, faire moins de route pour privilégier des horaires fixes. Mais finalement, pendant deux ans, je ne me sens pas à ma place dans un bureau. » Un client lui propose alors d’intégrer son équipe. A trois reprises, Jean-Louis Baudouin l’encourage à rejoindre les chantiers sous les couleurs d’Elec’Trum. « J’avais peur de mes lacunes en électricité. Bien qu’il m’ait proposé de me former, ça semblait déraisonnable. » Pourtant, en 2019, elle enfile un bleu de travail et rejoint Elec’Trum comme électrotechnicienne.
Une femme dans le bâtiment
Au bout de quelques mois, son collègue, chef de chantier, quitte l’entreprise spécialisée dans l’électricité et l’automatisme au service des industriels. Céline Blandin reprend alors cette responsabilité. « Je me souviens, on s’adressait à mes collègues hommes plutôt qu’à moi. Les clients comme les autres corps de métier se montraient surpris de voir une femme cheffe de chantier. J’ai aussi parfois surpris des remarques sexistes. » Pourtant, ces réactions ne freinent pas l’enthousiasme de la jeune femme. Céline Blandin préfère voir ce que certains perçoivent comme un inconvénient en avantage. « Voir une femme sur le chantier, ça marque les esprits ! Mais ce métier ne présente pas de difficultés physiques particulières, que l’on soit homme ou femme, c’est pareil. » D’ailleurs, loin d’une question de genre, c’est grâce à ces compétences notamment qu’Elec’Trum profite d’un bouche-à-oreille favorable.
L’aventure Elec’Trum
Le dirigeant anticipant sa retraite proche, il pense à Céline Blandin pour reprendre l’activité. « On tombe d’accord, ça coulait de source que j’allais reprendre. » La relation de confiance se met rapidement en place avec les différents clients. Au moment de la reprise, les hasards de la vie professionnelle laissent Céline Blandin seule face à ses chantiers. Pour faire face et travailler en confiance, elle embauche son conjoint, alors technico-commercial chez Sonepar et lui apprend le métier. Un parcours ressemblant à s’y méprendre au sien. « Il devient vite autonome. » Pour marquer ce changement, l’entreprise déménage de Levernois à Pommard passant de 70 à 350 mètres carrés d’atelier. Pour renforcer encore l’équipe, en mai 2023, elle recrute son frère car elle ne trouve pas les compétences techniques nécessaires sur le marché du travail. En parallèle, elle engage un apprenti et prête par ailleurs une attention particulière à accueillir les candidates au stage pour ouvrir leur vision.. « En septembre, j’aurais une apprentie » se réjouit-elle, heureuse de la vie qu’elle mène. Désormais, jour après jour, elle pense des projets uniques pour les industriels. « Nous ne sommes pas un électricien au sens propre. On ne fait pas de réparation à domicile, on part d’une page blanche pour concevoir la partie électrique indispensable pour faire marcher une ligne de production ou une machine. Nous assurons alors la réparation et la maintenance sur ce type d’équipement » Le monde viticole, l’industrie agro-alimentaire, les fabricants de machines font notamment appel à elle.
L’écoute et le partage
Attentive aux souhaits de ses clients, la jeune dirigeante prône aussi un management basé sur l’écoute. « Je ne me dis pas que je dirige, je préfère que l’on échange sur nos idées et que l’on voit la meilleure solution. » A la tête de son entreprise, Céline Blandin se réjouit de ce rôle et de cette liberté propre aux chefs d’entreprise. Un statut qu’elle ne partage pas avec son entourage. « J’ai constaté un certain décalage alors j’ai cherché à m’entourer d’un groupe qui comprenne. » Elle trouve celui qui lui ressemble en rejoignant Femmes des territoires à Beaune. Et quand elle ne gère pas Elec’Trum ? Céline Blandin s’occupe de sa famille, se dépense à la salle de sport et se prépare à un treck au Sénégal en 2024 où elle soutiendra l’association les Rubans roses pour lutter contre le cancer du sein et l’association Cap Eco Solidaire pour construire des écoles dans le pays. « On cherche encore des sponsors pour boucler le budget ! » Des amateurs ?
Nadège Hubert
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