BEAUNE

Beaune - Un télétravail à deux vitesses ? La règle des 20 km divise le conseil municipal

Beaune - Un télétravail à deux vitesses ? La règle des 20 km divise le conseil municipal

Le conseil municipal ce jeudi soir a vu une controverse inattendue : la règle des 20 km imposée dans la nouvelle charte télétravail. Une disposition jugée arbitraire par plusieurs élus, au premier rang desquels Carole Bernhard, qui a dénoncé une injustice de traitement entre les agents selon leur lieu de résidence. La délibération a finalement été retoquée pour réexamen.

Jeudi soir, une simple délibération sur la gestion des ressources humaines présentée par Sophie Lefaix, adjointe en charge de la questure, de l'emploi et de la formation, a suffi à faire vaciller l’ambiance du conseil municipal de Beaune. Parmi les quatre points de la délibération – transformation de poste, création, reclassement et mise à disposition – c’est l’actualisation de la charte télétravail qui a semé le trouble.
Derrière cette mise à jour en apparence administrative, une règle a soulevé l’incompréhension : l’accès au télétravail serait désormais réservé aux agents municipaux résidant à plus de 20 kilomètres de Beaune, sauf dérogation exceptionnelle. « Pourquoi les personnes habitant à Bligny-lès-Beaune ou à Savigny n’auraient-elles pas le droit de télétravailler ? » s’est insurgée Carole Bernhard du groupe d’opposition « Pour Beaune Vraiment », dénonçant une restriction arbitraire.
 
Une charte au goût amer
La charte présentée, qui avait initialement été rejetée par le comité social territorial avant de recevoir un avis favorable le 13 mars 2025, limite le télétravail à une demi-journée, voire une journée par semaine. Il est conditionné à la nature des missions, aux besoins du service, à la qualité de la connexion Internet, et surtout – c’est là que le bât blesse – à une résidence éloignée de plus de 20 km du centre de Beaune.
Le maire Alain Suguenot a tenté de justifier cette limitation qui n’est pas, pour lui, discriminatoire, mais reflète une approche pragmatique : « C’est une question de bon sens économique. Le télétravail a un coût, il est donc plus justifié pour des personnes habitant loin ». Avant d’émettre une crainte étonnante s’il n’y a pas de critères kilométriques : celle de voir les agents s’installer en périphérie ou dans d’autres villes comme Dijon ou Chalon, ce qui, selon lui, risquerait de « vider Beaune de sa population active ».  Mais au-delà de l’argument économique, le maire a exprimé une vision sceptique du télétravail dans la fonction publique : « Ce n’est pas dans le sens d’un progrès. On revient du télétravail aujourd’hui. Il y a une perte d’efficacité ».
Une déclaration qui a surpris jusque dans son propre camp. « Faux, les entreprises font machine arrière pour le full télétravail ! Il faut comprendre que le télétravail, ce n’est pas fuir le bureau, c’est se donner les moyens de mieux travailler sur certains dossiers, un outil pour des tâches nécessitant du calme et de la concentration », a rectifié Sophie Lefaix, pourtant porteuse de la délibération, tout en précisant que la charte ne prévoit qu’une demi-journée ou une journée maximum de télétravail par semaine, et sur la base du volontariat.
Une interprétation du maire aussi contredite par plusieurs élus, dont Anne Caillaud, adjointe en charge de la vie associative, de l'animation culturelle et du spectacle vivant, qui a rappelé : « Ce n’est pas un acquis social ! Le télétravail est une chance. Il permet de travailler dans de meilleures conditions, de se concentrer. Ce n’est pas une avancée à géométrie variable selon où l’on vit ».
Le télétravail est bien encadré : il repose sur le volontariat, il est réversible, accordé uniquement aux agents à temps plein, sur demande écrite. Mais la restriction géographique, elle, continue de faire débat. D’autant plus qu’elle pourrait priver une vingtaine d’agents déjà concernés de la possibilité de poursuivre leur télétravail hebdomadaire.
 
Une attractivité en jeu
Pour Carole Bernhard, comme pour d’autres élus, le sujet dépasse la question logistique : « Le télétravail rend une collectivité attractive aujourd’hui. Ce n’est pas une nouveauté, la Ville a du mal à recruter ou à garder ses agents, il faut donc adapter nos pratiques ».
Une position que plusieurs membres de la majorité semblent partager, dénonçant une règle incomprise, injuste, voire contre-productive.
 
Une délibération suspendue
Face à la fronde, le maire a préféré temporiser. La délibération sur la charte a été suspendue, le temps pour lui de comparer le droit avec d’autres collectivités : « On va voir si les autres le font ». Une réponse en forme d’aveu : sur ce dossier, Beaune avance à petits pas, sans encore saisir toute la portée du télétravail comme levier de modernisation et de bien-être au travail.

Jeannette Monarchi